La grève des étudiants au Québec

French version of Statement on the Quebec student strike by Fightback (Canada) and La Riposte (Quebec) (02 May 2012)

Les 12 fantastiques semaines de grèves des étudiants au Québec marquent une nouvelle étape dans la lutte dans l'État canadien. Cependant, alors que cette explosion est une nouveauté  pour le Canada, elle est simplement la continuation du mouvement international contre l'austérité que nous avons vu partout : les grèves générales grecques, le mouvement  des « indigné-es » en Espagne, dans le Wisconsin, le mouvement Occupy, l'inspiration des révolutions arabes, etc…

Une victoire pour les étudiant-es du Québec est une victoire pour tous les travailleuse-eurs et les jeunes, tant au Canada qu'à travers le monde, et il est essentiel que tout soit fait pour assurer son succès et en tirer les leçons nécessaires.

Les attaques contre les étudiant-es du Québec (et ailleurs) ne sont pas le résultat des caprices de tel ou tel politicien. Si cela était vrai, alors il s'agirait d'un phénomène isolé plutôt que d'une tendance généralisée à travers le monde. Les attaques font partie intégrante d'une attaque généralisée sur les travailleuse-eurs, les jeunes, et les opprimé-es. Elles ont comme base la crise du système économique capitaliste lui-même.

Autrement dit, les capitalistes ne peuvent pas se permettre de concessions, même les plus maigres, comme celles  arrachées par la classe ouvrière dans la période d'après-guerre. Au contraire, ils tentent de redresser la balance en leur faveur. Cela se manifeste par des attaques sur le salaire social, des attaques contre les travailleuse-eurs du secteur public et les services sociaux, contre les droits des immigré-es et des jeunes, des attaques également contre le droit des travailleuse-eurs de s'organiser et de faire grève.

Les capitalistes eux-mêmes comprennent la signification générale de cette lutte et implorent leurs représentants au sein du gouvernement de ne pas reculer. Dans un éditorial publié le 28 avril dernier dans la Gazette de Montréal, intitulé "Le choix : la démocratie ou la loi de la rue», ont pouvait lire : «Acheter la ''paix sociale'' ne peut pas être une solution permanente, car tous les autres groupe d'intérêt qui s'opposeront à l'avenir aux mesures d'austérité verrait que non seulement le gouvernement actuel, mais la société qu'il représente, peut être intimidé.» Ils voient l'austérité comme essentiel et, par conséquent, les étudiants doivent être écrasés.

La droite a tout essayé pour vaincre le mouvement et a échoué à plusieurs reprises. Ils ont essayé d'organiser des briseurs de grève par l'intermédiaire du mouvement du "carré vert" mais ils ont échoué. Ils ont essayé de terroriser les étudiant-es et les enseignant-es, en les insultant, ce qui n'a fait qu'enrager encore plus la population. Ils ont essayé de diviser le mouvement en diabolisant la Fédération des étudiant-es CLASSE. Ils ont à plusieurs reprises essayé la répression physique et l'étiquetage du mouvement comme violent.

Les allégations de violence sont tout à fait hypocrites de la part des administrateurs de la violence policière et économique contre les étudiant-es et les travailleuse-eurs. Il est également compréhensible que certains jeunes se déchaînent après que leurs demandes ont été ignorées depuis si longtemps. Briser une fenêtre ne peut en aucun cas être assimilée à la violence de masse institutionnelle du système. Cependant, nous ne croyons pas que ces actions individuelles vont servir à promouvoir la lutte. Nous soutenons le droit démocratique du mouvement à déterminer collectivement le degré de confrontation avec les forces étatiques qui est nécessaire pour faire avancer la lutte. Ce choix ne doit pas être imposé aux gens sans leur consentement - en effet, le seul moyen pour réussir à prendre des mesures d'autodéfense est de recevoir le soutien total du mouvement. Nous croyons que les syndicats étudiant-es devraient élire et organiser des responsables de comités d'autodéfense pour protéger les manifestations de la violence d’État, en maintenant les tactiques démocratiques propres à ce mouvement.

Actuellement, le mouvement est dans une impasse. Le gouvernement ne cédera pas et les étudiants ne vont pas quitter les rues. Cette situation ne peut durer indéfiniment. La tâche consiste à répandre le mouvement à la classe ouvrière dans son ensemble. Ceci est essentiel parce que, comme nous l'avons montré, cette lutte n'est qu'une partie d'un plan d'austérité qui touchera tous les travailleurs.

CLASSE a lancé un appel sur son site pour une grève générale "sociale". Il s'agit d'un véritable pas en avant, mais il doit y avoir un plan concret pour en faire une réalité. Ni les travailleurs eux-mêmes, ni leurs organisations, ne peuvent être ignorées dans la planification de cette action. Comme une première manière de montrer sa force, les fédérations syndicales doivent appeler à une grève générale de 24 heures à l'appui des étudiants et contre l'austérité. Les représentants des syndicats d’étudiants doivent en faire un enjeu clé à chaque apparition publique. Les étudiants doivent envoyer des délégations à chaque réunion du syndicat pour  faire pression pour cette demande. Toutefois, si les travailleurs eux-mêmes ne comprennent pas les objectifs de la lutte, le mouvement va fléchir. La CSN a appelé à des piquets symboliques, ce qui est une formidable opportunité pour les étudiants d'aller à la rencontre des travailleurs et d’expliquer la nécessité d'une grève générale et une action de solidarité, en expliquant que cette lutte nous concerne tous. En mai 1968, à Paris, les étudiants ont mis en place des comités de solidarité étudiants/travailleurs. La tâche était d'aller dans les lieux de travail et de discuter avec les travailleurs. Plusieurs fois, après ces discussions (et avec l'aide de délégués syndicaux sympathiques), les travailleurs ont décidé d'abandonner le travail en solidarité avec les étudiants. Finalement, les travailleurs ont commencé la grève en ajoutant leurs propres demandes au mouvement étudiant. Cette leçon de 1968 doit être mis en pratique dès maintenant!

En plus de la diffusion de la grève des étudiants parmi les travailleurs, il est nécessaire de la diffuser au delà des frontières nationales. Il a eu une conspiration dégoûtante de silence sur la grève par les médias de masse canadiens anglophone, et seule la «violence» des étudiants a été rapportée par les journalistes. Le mouvement étudiant canadien et le mouvement ouvrier ne peuvent pas permettre cette fracture, motivée par des intérêts économiques des puissants. Les liens de solidarité se tissent dans la lutte. Des manifestations de solidarité ont été organisées à Toronto et dans d'autres villes; les syndicats au Canada anglais ont donné des dizaines de milliers de dollars à la cause. CLASSE a pris la bonne approche et a envoyé un appel et une résolution aux syndicats canadiens en demandent de l'aide, des piquets de solidarité, et en invitant des orateurs pour expliquer le mouvement. Les étudiants du Québec ne sont pas seuls.

Cependant, la solidarité n'est pas unilatérale. Les étudiants canadiens ont beaucoup à apprendre du mouvement au Québec. Dans le reste du Canada, les frais de scolarité sont deux fois plus élevés qu'au Québec. Ce chiffre a été constamment utilisé comme un argument contre les étudiants du Québec. Le mouvement étudiant au Canada anglais doit commencer à se battre avec le même degré de radicalisme qu'au Québec. La Fédération canadienne des étudiants (CFS), le principal représentant dans les campus canadiens anglophones, doit commencer à planifier des manifestations de masse et à voter pour des grèves, en utilisant les événements du Québec comme une forme d'inspiration. Nous avons besoin d'une lutte généralisée qui rend toutes les parties plus fortes et arrêter la fracture promue par les patrons.

Il est capital de mettre en avant le fait que l'éducation est un droit et non un privilège. L'éducation doit être gratuite et accessible à tous! Certains diront que le système ne dispose pas de l'argent nécessaire pour se le permettre. Nous répondons que s'ils ont des milliards pour des avions de chasse, des prisons, pour renflouer des entreprises et faire des réductions d'impôts, alors il y a de l'argent pour offrir une éducation gratuite. Nous affirmons que l'éducation est un droit et si la société capitaliste ne peut se permettre ce droit, et bien c'est le capitalisme qui doit être aboli. Ils disent qu'ils ne peuvent pas se permettre des salaires décents, des emplois, des services, alors qu'en attendant la productivité augmente et les riches deviennent plus riches. Par leurs propres actions les patrons sont en train de condamner  leur système. La lutte pour la gratuité de l'enseignement doit être articulé avec le combat pour des conditions de vie décentes, le combat pour une société socialiste qui puisse prodiguer aux gens la santé, l’éducation… sur une base gratuite et accessible à tous. Le problème n'est pas l'idéologie  «néolibérale» des patrons, mais la crise du système lui-même!

Enfin, nous appelons à l'unité de tous les meilleurs combattants - les ouvriers conscients et les jeunes courageux - dans toute les luttes et dans chaque partie du monde. Comme nous l'avons indiqué dans notre introduction, la lutte des étudiants au Québec n'est qu'un élément d'une lutte plus large contre l'austérité capitaliste internationale, la crise et la guerre. Les travailleurs et les jeunes seront beaucoup mieux préparés pour gagner ces luttes si ils se battent ensemble, partagent les expériences et tirent les leçons d'autres luttes dans d'autres secteurs et pays. En Grèce, en Égypte et au Venezuela, des États-unis au Canada, nous avons besoin de construire une Tendance Marxiste Internationale pour unir les travailleurs et les jeunes. Rejoignez-nous!

Victoire pour les étudiants du Québec!

La lutte doit s'étendre à la classe ouvrière!

Pour une grève générale de 24 heures contre l'austérité et pour les étudiants!

Les étudiants du Québec ne sont pas seuls!

 Source: La Riposte (Quebec)